Le 8 avril s'avère une journée 100% masculine dans nos éphémérides du théâtre québécois. Voyez ce que l'on veut dire par là en lisant plus bas !
1935: Naissance d'Yvan Canuel
Natif de Mont-Joli, le comédien et metteur en scène Yvan Canuel a eu une carrière des plus prolifiques. Marié à la comédienne Lucille Papineau avec qui il fondera et dirigera le Théâtre Pont-Château de Côteau-du-Lac en Montérégie pendant de nombreuses années, comme bien des comédiens, Yvan Canuel s'est surtout fait connaître du grand public par ses rôles à la télévision, de Rue des Pignons et La Ribouldingue à L'Héritage, Scoop, Montréal P.Q. et Le Retour. À la scène, il a été très impliqué à la Nouvelle Compagnie Théâtrale (Théâtre Denise-Pelletier), coécrivant des spectacles à saveur quelque peu pédagogique (initiation au théâtre) avec Gilles Marsolais et Marc Favreau (Atelier 72, Spectacle Commedia dell'arte respectivement), signant des mises en scène éclatées (Antigone d'après Sophocle, Ben-Ur de Jean Barbeau, la création de Contact d'André Myette, Du vent dans les branches de sassafras de René de Obaldia, Le Malade imaginaire de Molière, Macbeth de Shakespeare) et jouant quelques rôles mémorables (dans Zone de Marcel Dubé, Le Roi se meurt d'Ionesco, Arlequin, valet de deux maîtres de Goldoni). Il travaille aussi chez Duceppe, signant les mises en scène des créations de Médium saignant (revisited) de Françoise Loranger et Les Passeuses de Pierre Morency ainsi que Deux et deux font sexe de Richard Harris et Leslie Darbon dont il signe aussi l'adaptation et traduction. Il mettra en scène Le Cid Maghané de Réjean Ducharme pour Le Trident, Je veux voir Mioussov de Kataiev pour le Rideau Vert et Un Goût de miel de Schelagh Delaney pour le Quat'Sous dont il signe aussi la traduction. Jean Gascon, Guy Hoffmann et Yves Desgagnés le mettent en scène au TNM alors que Paul Buissonneau le dirige au Quat'Sous et Jean Dalmain le dirige au Rideau Vert. Il est mort à Ottawa à seulement 64 ans des suites d'une pneumonie. Ses fils, le comédien Nicolas Canuel et le réalisateur Érik Canuel, perpétuent la lignée artistique dans la famille.
1961: Naissance d'Élise Guilbault
Photo: Eric Myre - Page Facebook La Vraie Nature
Née à Saint-Lin des Laurentides, Élise Guilbault est une des comédiennes les plus appréciées du public québécois depuis qu'elle est sortie de l'École Nationale de Théâtre au milieu des années 80. En début de carrière, elle joue beaucoup de personnages plus vieux que son âge, notamment dans Les Paravents de Jean Genet au Centre National des Arts et au TNM, dans Richard III de Shakespeare au Théâtre du Rideau Vert, dans La Maison suspendue de Michel Tremblay à la Compagnie Jean Duceppe et dans Les Reines de Normand Chaurette au Centre du Théâtre d'Aujourd'hui, toutes des mises en scène d'André Brassard qui l'adopte comme une de ses comédiennes fétiches. À la télé aussi, elle joue plus vieille que son âge dans Jeux de société, le premier téléroman d'Anne Boyer et Michel D'Astous qu'elle retrouvera ensuite dans Deux Frères et Yamaska. On découvrira aussi son talent comique au théâtre (Variations sur un temps de David Ives au Quat'Sous dans laquelle elle jouera d'abord avec Marc Labrèche, Diane Lavallée et Luc Picard et qu'elle reprendra pour Juste pour rire avec James Hyndman, Anne Dorval, Marc Labrèche...) et à la télévision (Élise la soeur de Guy dans Un Gars, une Fille et Britany dans Le Coeur a ses raisons) tout en continuant à l'apprécier dans des rôles d'une grande intensité (Avec un grand A de Janette Bertrand, Emma, Unité 9 et Cheval-Serpent de Danielle Trottier, 30 Vies de Fabienne Larouche). À la scène, elle sera une Albertine à 40 ans mémorable dans la reprise par Martine Beaulne d'Albertine, en cinq temps de Michel Tremblay qu'elle jouera aussi dans la captation télé par André Melançon, en plus de jouer David Mamet, Brad Fraser, Michèle Magny (le rôle-titre dans Marina, le dernier rose aux joues), Serge Boucher, Adam Bock... travaillant avec René Richard Cyr, René-Daniel Dubois, Serge Denoncourt, Pierre Bernard, Lorraine Pintal et sa soeur Denise Guilbault. Ses collaborations avec Bernard Émond au cinéma ont fait éclore de petits bijoux cinématographiques: La Femme qui boit, La Neuvaine, La Dotation, Pour vivre ici. Bonne fête, Élise!
1961: Naissance de Patrice Coquereau
Photo: Julien Faugère
Né à Québec et formé en théâtre d'abord à l'Université d'Ottawa puis à l'École Nationale de Théâtre, Patrice Coquereau s'est surtout fait connaître du public de la télé par son rôle de Lewis, le barman, dans Le Coeur a ses raisons et pour son rôle dans Rumeurs, la première télésérie comique d'Isabelle Langlois. Il roulait déjà sa bosse au théâtre, travaillant beaucoup avec Denise Filiatrault (Les Fridolinades de Gratien Gélinas, Les Palmes de M. Schutz de Jean-Noël Fenwick, Picasso au Lapin d'argile de Charles D. Schmendiman, Le Bourgeois gentilhomme de Molière et plus récemment dans Le Repas des fauves de Vahé Katcha) et René Richard Cyr (L'Éveil du printemps de Wedekind, Un Simple Soldat de Marcel Dubé, Rhinocéros d'Ionesco et Le Misanthrope de Molière) et plongeant dans des créations avec Les Éternels Pigistes, compagnie dont il participe à la fondation (Quelques humains, Le Rire de la mer de Pierre-Michel Tremblay). Il sera aussi des créations de La Contre-Nature de Chrysippe Tanguay, écologiste de Michel Marc Bouchard avant même d'entrer à l'École Nationale, participera à la création de Donut de Jean-François Caron en 1986 et aux créations de deux pièces de Geneviève Billette, Crime contre l'humanité (1980) et Le Goûteur (1982), des productions du Théâtre PàP mises en scène de Claude Poissant. En 1987, il sera également le premier Claude dans Le Vrai Monde? de Michel Tremblay quand André Brassard créera la pièce au Centre National des Arts à Ottawa et au Théâtre du Rideau Vert à Montréal. Encore plus récemment, on a pu le voir sur scène dans Candide ou L'Optimisme de Pierre Yves Lemieux selon Voltaire au TNM dans une mise en scène d'Alice Ronfard et dans Le Malade imaginaire de Molière dans une mise en scène de Michel Monty, pièce dans laquelle il avait déjà joué Thomas Diafoirus fils dirigé par Carl Béchard et dans laquelle il jouait maintenant Diafoirus père avant de prendre le rôle d'Oscar Bellemare dans l'adaptation théâtrale de Symphorien qui connaît un succès monstre aux quatre coins du Québec. Bonne fête, Patrice !
1983: Création de Les Gars de Jean Barbeau dans une mise en scène de Claude Maher au Théâtre Port-Royal de la Place des Arts, une production de la Compagnie Jean Duceppe (Montréal)
Un grand succès à la Compagnie Jean Duceppe avant d'être présentée en tournée et en théâtre d'été, cette pièce de Jean Barbeau mettait en vedette Michel Dumont, Claude Michaud, Paul Savoie et Esther Lewis à sa création. À la reprise pour la tournée, Vincent Bilodeau remplaçait Michel Dumont et Dominique Guay remplaçait Esther Lewis, comme on peut le voir sur cette affiche tirée des archives de BAnQ.
1987: Création de Le Printemps, monsieur Deslauriers de René-Daniel Dubois dans une mise en scène de Daniel Roussel au Théâtre Port-Royal de la Place des Arts, une production de la Compagnie Jean Duceppe (Montréal)
Après le succès phénoménal de Being at Home with Claude, tout le monde s'arrachait René-Daniel Dubois et Jean Duceppe est tombé sous le charme de sa fresque familiale Le Printemps, monsieur Deslauriers que Dubois avait d'abord baptisée Moi, j'rêvais d'Watertown. Lorsqu'est arrivé le printemps 1987, le titre avait changé. La distribution colossale jouait sur une reproduction de patinoire d'aréna. On y retrouvait Gérard Poirier, Robert Lalonde, Patricia Nolin, Mireille Thibault, Jean-Louis Millette, Louise Saint-Pierre, Raymond Legault, Guy Nadon, Marc Béland et Jean-François Blanchard. Un souvenir impérissable! Je me souviens aussi que Daniel Roussel, le metteur en scène, avait dû se battre pour faire accepter Robert Lalonde par Jean Duceppe parce que ce dernier avait eu un conflit avec l'acteur et refusait de lâcher le morceau depuis des années, banissant Robert Lalonde de la scène du Théâtre Port-Royal. Cette production aura permis la réconciliation avant le décès de monsieur Duceppe.
1994: Décès de François Rozet
Né à Villars-les-Dombes en France en 1899, le comédien François Rozet connaît déjà une carrière impressionnante sur scène en France avant de venir s'établir à Montréal. Il joue Corneille et Racine, tout particulièrement à L'Odéon où il passe 7 des 20 ans de sa carrière parisienne aux côtés des Dullin, Copeau et même Sarah Bernhardt. Puis, pendant une tournée en Amérique du Sud pour la propagande française, comme nous l'explique Michel Vaïs dans le Dictionnaire des artistes du théâtre québécois, il est invité à venir à Montréal pour jouer à L'Arcade où il donnera 13 représentations par semaine d'une nouvelle pièce chaque semaine. Par la suite, il jouera sur toutes les scènes: le Théâtre du Nouveau Monde, la Nouvelle Compagnie Théâtrale, le Théâtre du Rideau Vert excellant dans les classiques, bien sûr - Racine, Marivaux, Rostand, Shakespeare - mais également des auteurs plus contemporains comme Claudel, Montherlant, Ionesco et Guitry (il donnera 100 représentations de Mon père avait raison au TNM!). Quand Jean-Louis Roux le dirige dans le solo de Beckett, La dernière bande, c'est le triomphe en 1969. Il sera aussi un grand pédagogue et plusieurs de nos grands comédiens le citaient comme un incontournable dans leur formation: Hélène Loiselle, Gilles Pelletier, Denise Pelletier, Gilles Latulippe, Yvon Deschamps... En 1971, il était nommé officier de l'Ordre du Canada et vingt ans plus tard, l'Association québécoise des critiques de théâtre lui remettait son prix Hommage. Il avait 95 ans au moment de son décès.
2022: Décès d'Yves Massicotte
Né à Montréal le 15 mai 1934, c'est dans sa ville natale que le comédien et metteur en scène Yves Massicotte s'éteindra à 87 ans. Il découvrira le théâtre dans son enfance au Collège Jean-de-Brébeuf et, avec sa voix, sa diction, son charme, séduira les réalisateurs et les directeurs de plateau de doublage. Connu de plusieurs générations de jeunes Québécois pour son rôle titre dans Les 100 Tours de Centour au début des années 70, il avait pourtant déjà une belle carrière tant auprès du jeune public (Picolo, Fanfreluche) que des adultes (La Pension Velder, Filles d'Ève, D'Iberville). Par la suite, on le verra entre autres dans La Montagne du Hollandais et Les Olden, Terre Humaine, Entre chien et loup, Des Fleurs sur la neige, Innocence, Sous le signe du Lion II, Ramdam et Si la tendance se maintient. Au théâtre, en plus de mettre en scène la création de L'Auberge des Morts Subites de Félix Leclerc en 1963, il joue quelques fois au Quat'Sous pour Paul Buissonneau (La Bande à Bonnot d'Henri François Rey et La Passion ou le Manteau de Galilée de Buissonneau), au TNM pour Jean-Louis Roux (Pantagleize de Michel de Ghelderode) et pour Jean-Pierre Ronfard (Oreste ou Les Choéphores) et sera des créations de Le Réformiste de Marcel Dubé (TNM), Québec, printemps 1918 de Jean Provencher et Gilles Lachance (Trident), Les Crasseux d'Antonine Maillet (Duceppe), Contact d'André Myette et Pontiac de Pierre Goulet (NCT-Théâtre Denise-Pelletier). Il jouera Molière (Don Juan, La Jalousie du Barbouillé, Le Médecin malgré lui), Tchekhov (L'Ours), Robert Thomas (Piège pour un homme seul) et Pavel Kohout (Pauvre Assassin). En doublage, il prêtera sa voix à Walter Matthau, Ned Beatty, Sean Connery, Charles Durning et Jon Voight, pour n'en nommer que quelques-uns, en plus de doubler nombre de films d'animation dont l'Alladin et La Petite Sirène de Disney, Transformers et King of the Hill et The SImpsons pour la télé.
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