top of page
  • Photo du rédacteur

Théâtre: «Mama» de Nathalie Doummar: Les Belles-Sœurs pour le nouveau millénaire!

Dernière mise à jour : 16 sept. 2022

par Yanik Comeau (Comunik Média/ZoneCulture)

J’ai découvert – et été immédiatement séduit par – l’écriture de Nathalie Doummar, comédienne et dramaturge, par le biais de la télévision puisque c’est sa série Téodore pas de H mettant en vedette Philippe-Audrey Larrue-Saint-Jacques sur l’application de Télé-Québec qui aura été ma porte d’entrée dans son univers. Pas Coco, pas Sissi, pas L’Amour est un dumpling qu’elle a coécrit avec Mathieu Quesnel, pas Le Loup qui a été créée en 5 à 7 dans les coulisses de Duceppe mais qui a été interrompue par la pandémie alors que tous les billets étaient vendus et qu’on annonçait de nouvelles séries de représentations qui n’ont pas pu avoir lieu non plus.



Clairement fans de l’écriture de cette jeune autrice-actrice, Jean-Simon Traversy et David Laurin lui ont offert la deuxième résidence d’écriture de Duceppe pour que, comme François Archambault (Pétrole), Nathalie Doummar puisse écrire sa première pièce «grand plateau», elle qui avait, jusque-là, écrit des pièces plus intimes. Avec Mama, elle signe peut-être sa première pièce à grosse distribution (13 comédiennes et un comédien) mais malgré l’immense plateau du Théâtre Jean-Duceppe qui peut parfois trahir la proximité qu’on souhaiterait pour certaines œuvres (ça m’avait frappé avec Le Terrier lors de la première saison du duo Laurin-Traversy), elle ne perd pas un iota de l’intimité que requiert cette comédie dramatique familiale d’une grande finesse, d’une sensibilité irrésistible et d’une vérité désarmante.



Parce qu’au cœur de Mama, il y a le cœur de Nathalie Doummar. Le cœur d’une artiste qui, à l’instar de Michel Tremblay, de Serge Boucher, de Tracy Letts (le comédien auteur américain derrière Disparu.e.s (August : Osage County) en 2019), a un sens aiguisé de l’observation, un formidable instinct de dialoguiste et une façon organique de raconter la famille. Une façon bien à elle de raconter et d’hommager la femme comme les trois autres qui, habiles imposteurs, n’en sont pas.



Avec Mama, Nathalie Doummar nous amène dans une famille migrante égyptienne de la banlieue montréalaise (Ville Saint-Laurent? Brossard? Laval? On pourrait être à Limoilou, pourquoi pas?), dans une maison qui rappelle la modernité architecturale des années 60 (magnifique scénographie de Geneviève Lizotte au cœur d’une production écoresponsable où l’on recycle et réutilise au maximum accessoires et éléments de décor), douze mères, sœurs, belles-mères, belles-sœurs, filles, nièces, cousines réunies autour d’un lit plutôt qu’autour d’une table de cuisine du Plateau Mont-Royal. Nathalie Doummar a écrit Les Belles-Sœurs, 24 poses (portraits), August: Osage County de la nouvelle décennie! Un classique intemporel et universel.



Dans un rafraîchissant souci d’authenticité, comme c’était le cas pour Héritage (A Raisin in the Sun) en ouverture de la saison 2019, Duceppe a réussi à rassembler autour de l’autrice-comédienne égypto-québécoise, qui joue elle-même un personnage pivot au sein de la famille, une distribution presqu’entièrement arabe, maghrébine, moyenne-orientale. À l’exception de la formidable Élisabeth Sirois (qui incarne l’infirmière attachante et qui finit par être «adoptée» au cœur de la famille) et d’Igor Ovadis (comédien ukrainien qui incarne le papa sur son lit de mort), toutes les comédiennes sont issues de la communauté, des plus connues (Karina Aktouf, Lamia Benhacine, Sharon Ibgui, Mireille Naggar, Natalie Tannous, Leïla Thibeault-Louchem) aux jeunes évidemment moins connues mais tout aussi talentueuses (Ambre Jabrane, Wiam Mokhtari, la petite sœur Nicole Doummar…) qui font aussi leur chemin dans notre télé et notre cinéma de plus en plus diversifiés. Toute la distribution patauge avec aisance dans cette partition finement écrite qui nuance les dialogues dans les couleurs de chacune des générations.



Habilement orchestrée par la jeune metteure en scène, auteure et comédienne Marie-Ève Milot, cette production, qui nous fait autant rire aux éclats que fendre le coeur, ouvre en beauté la 50e saison 100% créations québécoises de Duceppe, saison que tant le fondateur Jean Duceppe que son digne héritier Michel Dumont auraient endossée avec toute la fierté du Québec ouvert sur le monde qu’ils avaient tatoué sur le cœur.



Mama de Nathalie Doummar

Mise en scène de Marie-Ève Milot

Assistance à la mise en scène: Josianne Dulong-Savignac

Interprétation: Karina Aktouf, Lamia Benhacine, Nathalie Doummar, Nicole Doummar, Sharon Ibgui, Ambre Jabrane, Aïda Nader, Wiam Mokhtari, Mireille Naggar, Igor Ovadis, Natalie Tannous, Mireille Tawfik, Leïla Thibeault-Louchem, Élisabeth Sirois

Scénographie: Geneviève Lizotte

Costumes: Cynthia St-Gelais

Lumière: Martin Sirois

Musique: Antoine Berthiaume

Accessoires : Nadine Jaafar

Vidéo: Chélanie Beaudin-Quintin

Maquillage et coiffure Justine Denoncourt-Bélanger

Une production Duceppe

Du 7 septembre au 8 octobre 2022 (durée: 1h50 sans entracte) *** Supplémentaire: Samedi 8 octobre 2022 à 20h

Théâtre Jean-Duceppe, Place des Arts, Montréal.

Info: https://duceppe.com/mama/

Photos: Danny Taillon

bottom of page