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  • Photo du rédacteurYanik Comeau

Théâtre: «Chimerica» de Lucy Kirkwood: Retour à Tian’anmen

par Yanik Comeau (Comunik Média/ZoneCulture)


   Après sa pièce Les Enfants, écrite en 2016 et présentée chez Duceppe en 2020, les directeurs artistiques replongent dans le répertoire de la jeune Britannique Lucy Kirkwood pour nous proposer une pièce encore plus puissante, plus touffue, plus dense, Chimerica, qu’elle aura pris cinq ans à écrire et qui sera terminée et présentée pour la première fois en 2013.



Avec Chimerica, une contraction entre China et America, on replonge dans une tranche d’histoire, une délicieuse habitude qu’a pris le tandem Traversy-Laurin avec des œuvres comme Oslo, Au sommet de la montagne… Sans rester pris dans le passé, Chimerica revisite habilement l’épisode arrache-cœur de la tragédie de la place Tian’anmen au printemps 1989 tout en nous proposant un brillant Que sont-ils devenus?



   Grâce à la générosité de la Fondation Cole dont Duceppe profite grandement depuis Héritage (A Raisin in the sun), un organisme qui favorise les arts de la scène qui mettent en valeur les minorités visibles, cette production absolument ravissante nous fait découvrir ou redécouvrir de formidables interprètes sino-québécois qui composent la majorité de la distribution. Le metteur en scène Charles Dauphinais, avec l’aide de son assistante, Sophie Gee, de la traductrice Wai-Yin Kwok et de la coach de mandarin Charo Foo Tai Wei, donnent une authenticité à la pièce en présentant plusieurs passages en mandarin avec surtitres.



   Tout de cette production respire l’authenticité, la vérité, le respect. D’abord, l’excellente traduction de Maryse Warda, qui avait déjà traduit Les Enfants, est tout à fait québécoise mais habilement respectueuse des niveaux de langage des personnages et de leurs accents. La scénographie écoresponsable de Loïc Lacroix-Hoy – un conteneur qui sert d’appartement et de salle d’interrogatoire et dont le « toît » devient un autre appartement ainsi que de nombreux échafaudages multi usages – est finement utilisée, les costumes de Jessica Poirier-Chang sont brillants, la vidéo de Robin Kittel-Ouellet appuie merveilleusement bien le propos, la musique et la conception sonore de lefutur nous transportent et les éclairages de Marie-Aube Saint-Amant Duplessis sont d’une efficacité redoutable.



   Maintenant, que dire des acteurs? Alexandre Goyette incarne le photographe qui a pris ce fameux cliché du jeune homme aux sacs à emplettes devant le tank sur la place. Il est nuancé à souhait et très fort aux côtés de Marie-Hélène Thibault, Marie-Laurence Moreau et Tania Kontoyanni, cette dernière qui incarne plusieurs personnages avec brio. On se regale du jeu de Manuel Tadros et de Philippe Racine qui incarnent plusieurs personnages mais ce sont les formidables acteurs chinois au charisme incroyable qui nous captivent: Derek Kwan et Yuu Ki sont particulièrement touchants en Zhang Lin plus vieux et plus jeune et Yuu Ki se transforme complètement pour devenir le neveu de son personnage plus tard. Il est fabuleux! Albert Kwan incarne Zhang Wei, le frère plus rigide, Shiong-En Chan est à la fois très drôle et touchante dans ses deux rôles, Li Li est magnifique, particulièrement dans le rôle de Liuli, la jeune amoureuse de Zhang Li, et Annie Yao se transforme habilement pour jouer quatre personnages différents.



   On sort ému, grandi, sonné de ce thriller psychologique qui nous fait passer par toute la gamme des émotions. Des émotions en tant réel, comme le disant un des slogans de Duceppe sous le règne de feu Michel Dumont à la direction aristique. Et c’est ce qu’on attend des arts de la scène. Quand, en plus, ils nous font voyager, quoi demander de plus?



Chimerica de Lucy Kirkwood Traduction: Maryse Warda Traductrice vers le mandarin: Wai-Yin Kwok Mise en scène de Charles Dauphinais Conseillère à la mise en scène: Sophie Gee Assistance à la mise en scène: Lou Arteau Interprétation: Shiong-En Chan, Alexandre Goyette, Yuu Ki, Tania Kontoyanni, Albert Kwan, Derek Kwan, Li Li, Marie-Laurence Moreau, Philippe Racine, Manuel Tadros, Marie-Hélène Thibault et Annie Yao Scénographie: Loïc Lacroix-Hoy Costumes: Jessica Poirier-Chang Accessoires: Mayumi Ide-Bergeron Éclairages: Marie-Aube St-Amant Duplessis Musique et conception sonore: lefutur Vidéo: Robin Kittel-Ouellet Conseillère au mouvement et coach de mandarin: Charo Foo Tai Wei Coiffure et maquillage: Sylvie Rolland Prévost Une production Duceppe avec le soutien de la Fondation Cole Du 17 janvier au 17 février 2024 (durée: 2h55 incluant entracte) Théâtre Jean-Duceppe, Place des Arts, Montréal Info: https://duceppe.com/chimerica/ Photos: Danny Taillon

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