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Arts vivants: «La Messe de l’âne», une création d’Olivier de Sagazan: Affreux, sales et méchants

Dernière mise à jour : 17 oct. 2023

par Yanik Comeau (Comunik Média/ZoneCulture)

C’est en 2016 que le public montréalais découvrait pour la première fois le travail du sculpteur, performeur, peintre et plasticien français Olivier de Sagazan originaire du Congo alors qu’il venait présenter son solo Transfiguration. Pas étonnant que la directrice artistique D. Kimm ait continué à suivre de près ce créateur fascinant et qu’elle ait voulu le faire revenir à Montréal dès que l’occasion s’est présentée.



Sa plus récente création est le spectacle le plus sale que je me sois adonné à voir dans ma longue carrière de spectateur, critique, artiste de théâtre. Sans doute aussi un des plus fascinants visuellement, des plus troublants, des plus violents, des plus sidérants. Ce qui commence avec un troublant premier tableau qui présente un monologue d’un membre du clergé dément qui s’enchaîne sur un numéro de danse qui rappelle les chorégraphies de Catherine Gaudet se transforme de tableau en tableau en une charge contre les politiciens/dictateurs qui fait écho à 1984 et La République des animaux (Animal Farm) de George Orwell.



Menés par de Sagazan lui-même, les interprètes s’enduisent le visage de couches d’argile et se créent des masques temporaires qui n’auront jamais le temps de sécher avant qu’ils se les peignent avec leurs doigts, formant tour à tour des becs d’oiseaux de proie, des groins de cochons et autres. Ils se métamorphosent sous nos yeux de façon épatante et avec une agilité impressionnante autant qu’une violence assumée. Bien que les tableaux soient hautement symboliques et subjectifs, il est difficile pour le spectateur de comprendre exactement où de Sagazan veut en venir au-delà de sa quête de forme esthétique qui frôle le génie. Pour ce qui est du fond, on le cherche… et on finit par renoncer après quelques tableaux parce que ce n’est peut-être justement pas ce qu’il faut venir chercher.



Les tableaux du sac de boxe pendant lequel un interprète défonce à coups d’poing cet accessoire sportif recouvert (probablement) d’argile séché qui se détache en d’étouffants nuages de poussière et celui du viol qui frôle l’insupportable ne sont que deux exemples de la démarche sans limite d’Olivier de Sagazan. Qu’il puisse toujours pousser ainsi ses interprètes dans leurs derniers retranchements – même en 2023 – est remarquable mais pas moins troublant. On se surprend constamment à se demander si les interprètes ne sont pas des victimes d’un tyran qui pousse l’art à des limites à peine supportables.


On sort de la salle complètement soufflé avec l’impression d’avoir assisté à une production aux influences multiples, de La La La Human Steps et Carbone 14 en passant par Beckett, Orwell (je l’ai déjà dit), Fritz Lang et quoi encore. Fascinant et bouleversant à la fois. Le soir de la dernière, une partie du public était tellement en délire à la fin de la représentation qu’on se demandait s’il n’y allait pas y avoir une émeute sur l’avenue Lalonde à la sortie.



La Messe de l’âne, une création d’Olivier de Sagazan Interprétation: Olivier De Sagazan, Maureen Bator, Borna Babić, Shirley Niclais, Stephane Sant et Ele Madell Lumières: Pacome Boisselier Régie: Antoine Gibon Production : Ipsul Producteur délégué CDN de Normandie-Rouen Production Les Filles électriques / Phénomena Coproduction Ville de Saint-Nazaire, Région Pays de la Loire, Théâtre du Mac Orlan deBrest, Le Palc de Châlons-en-Champagne, Scène nationale de Saint-Nazaire Codiffusion: Usine C présenté dans le cadre du Festival Phénomena Dimanche le 9 octobre 2022 à 17h (durée: 45 mins sans entracte) Usine C, 1345, avenue Lalonde, Montréal Informations: https://usine-c.com/spectacle/la-messe-de-lane

Photographes: Alain Monot et Caroline Hayeur

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