Théâtre: «Méthadone Bertrand» de Vincent Paquette: Dis-moi le si je dérange, madame

Yanik Comeau
il y a 4 jours
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par Yanik Comeau (Comunik Média/ZoneCulture)

Entre Anna – Ces trains qui foncent sur moi au TNM et Corps fantômes chez Duceppe, deux fresques colossales de 3h30, il fait bon de se retrouver dans l’intimité de la salle de répétition de La Licorne pour un 5 à 7 théâtre, ces pièces plus courtes à distribution réduite inspirées du concept écossais A Play, a Pie, and a Pint. Bien que le Théâtre Bistouri en ait presque fait une spécialité (il reprendra d’ailleurs en 2026 Possessions que nous avions vue au printemps dernier), la Licorne, Duceppe, La Bordée à Québec accueillent néanmoins d’autres compagnies qui sont joyeusement entrées dans le bal.

C’est le cas du Théâtre Astronaute qui entre dans la danse avec sa troisième production présentée ces jours-ci à La Licorne et à La Bordée en mars prochain. Méthadone Bertrand, premier texte de l’acteur Vincent Paquette qu’on a vu chez Duceppe deux fois ces dernières années (Royal de Jean-Philippe Baril-Guérard et Être ou ne pas être un douchebag de Mary-Lee Picknell, sur la grande scène et en coulisses en 5 à 7 respectivement), une pièce inspirée d’un fait vécu et qu’il a écrite dans le cadre d’une résidence d’écriture pour la relève à La Licorne.

On ne peut pas dire que la comédienne Marie-Ginette Guay chôme par les temps qui courent. C’est entre deux séries de représentations en tournée de Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu ? qu’elle débarque à La Licorne pour devenir cette madame Bertrand (pas celle de la chanson de Charlebois, bien sûr, parce que celle-là, c’est Janette), une femme de 75 ans qui vit dans un petit appartement où elle écoute ses microsillons de Robert en fumant des cigarettes et en endurant sa douleur… tout en attendant que Félix, le jeune livreur de la pharmacie, lui apporte ses médicaments.

Comme tant d’autres belles pièces que j’ai pu voir dans cette formule 5 à 7, Méthadone Bertrand est à la fois touchante, drôle et intime. L’auteur nous propose un univers aussi quotidien qu’universel et dont une des thématiques – le clash des générations – est aussi fascinante que drôle. Vincent Paquette a le sens du dialogue et dirige ses interprètes avec sensibilité.

Marie-Ginette Guay qui, récemment, a été tour à tour maman Plouffe, la mère de François Morency dans Discussions avec mes parents, une résidente de «maison de vieux» dans le théâtre documentaire Tout inclus de François Grisé et la femme de Rémy Girard dans Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu ?, est tout simplement magnifique. Aussi drôle que déchirante, aussi sobre que confrontante, elle incarne cette madame Bertrand avec un aplomb impressionnant. Le jeune Samuel Bouchard, son Félix qui veut juste rentrer chez lui pour oublier son propre lot de problèmes, livre avec grande justesse cette partition vraiment bien écrite (j’adore comment il tutoie madame Bertrand… mais l’appelle «madame»!).

Marie-Ginette Guay attire un public plus que jamais maintenant qu’elle est connue aux quatre coins du Québec. Mais au-delà d’être une tête d’affiche, elle livre la marchandise… tout comme chaque détail de cette production qui ne laissera personne indifférent.

À recommander sans hésiter.