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«Le Poids des fourmis» de David Paquet: Parce que la fin est proche, proche, proche…

par Yanik Comeau (Comunik Média / ZoneCulture)


Dans le monde apocalyptique dans lequel nous vivons, difficile de ne pas écrire du théâtre engagé quand on s’adresse au public de la génération qui nous suit. Avec Le Poids des fourmis, la pièce que le Théâtre Bluff lui a commandé, David Paquet, l’auteur des encensés Porc-épic et Le Brasier, livre un texte signature, une pièce dans laquelle on reconnaît son style, son humour, ses dialogues corrosifs et qui ne tombe pas – fort heureusement – dans la condescendance – involontaire, bien sûr – de certains auteurs qui s’adressent aux ados. La seule chose qui fait tiquer dans ce texte ? L’incontournable monologue ode à la Terre qui ne peut malheureusement pas éviter les lieux communs, mais qui est néanmoins bien écrit et joué avec une puissance remarquable par Gabriel Szabo.


Cela étant dit, on ne peut que se réjouir de retrouver le tandem derrière Le Brasier, Paquet et Philippe Cyr à la mise en scène. Le Théâtre Bluff, qui nous a habitué à des productions «pour tous» beaucoup plus qu’à du «théâtre pour ado» à proprement dit – pour le plus grand bonheur des jeunes tout autant que des adultes – frappe dans le mille encore une fois après une Antioche de Sarah Berthiaume que j’avais adorée et l’inoubliable D’Alaska de Sébastien Harrison, entre autres.



Rafraîchissante, cette histoire pour le moins irrévérencieuse que celle de ces deux adolescents, Jeanne (Élisabeth Smith, fougueuse, énergique, généreuse) et Olivier (comique et touchant Gabriel Szabo que j’avais aussi beaucoup aimé dans Mon Héros Oussama et dans Le Reste vous le connaissez par le cinéma), qui se trouvent plongés involontairement dans une course à la présidence de leur conseil scolaire. Pendant leur périple politique d’une absurdité hallucinée et hallucinante, ils croiseront une pléiade d’«adultes» joués par Gaétan Nadeau et Nathalie Claude qui multiplient les personnages et ravissent, rivalisant d’audace, de folie, d’irrévérence, de couleur.



Pendant soixante-dix minutes, on est plongé dans l’univers Paquet-Cyr qui avait séduit avec le saisissant Brasier. Une scénographie ingénieuse d’Odile Gamache, des éclairages criards même blafards par moments de Cédric Delorme-Bouchard, des costumes éclatants et amusants d’Étienne-René Contant construisent un univers oscillant sans cesse entre l’espoir de la couleur et le désespoir de l’abysse des balles noires.



Dirigeant ses comédiens dans un bonheur clairement contagieux, Philippe Cyr est comme un poisson dans l’eau ou un enfant dans le bac à balles d’une salle de jeux de McDonald’s. Nathalie Claude, une de nos comédiennes les plus sous-estimées, est absolument formidable, se métamorphosant en quelques secondes et ne reculant devant rien pour faire vivre chacun de ses personnages. Gaétan Nadeau épate par son sens du timing sans décevoir pour autant dans les moments plus sombres, les scènes plus «malaisantes».


On ne s’étonne pas que ce spectacle affiche (presque) complet. Ce qui étonnerait, ce serait qu’il ne soit pas repris, qu’il ne fasse pas l’objet d’une nouvelle série de représentations. Parce que tout le monde y trouve son compte. Tant les jeunes que les moins jeunes. David Paquet est une voix que l’on se plaît à retrouver d’une pièce à l’autre, une voix qui, malgré une saveur bien personnelle que l’on reconnaît aussi avec chaque nouveau texte, ne lasse pas pour autant.


La Salle Fred-Barry, pour une deuxième saison consécutive, offre une programmation d’une puissante diversité, une enfilade de productions qu’il fait bon savourer.



Le Poids des fourmis de David Paquet Mise en scène: Philippe Cyr Avec Nathalie Claude, Gaétan Nadeau, Élisabeth Smith et Gabriel Szabo Une production du Théâtre Bluff Du 19 novembre au 7 décembre 2019 (1h15 sans entracte) *** Supplémentaire : Jeudi le 5 décembre à 19h30 Salle Fred-Barry (Théâtre Denise-Pelletier), 4353, rue Sainte-Catherine, Montréal Réservations : 514-253-8974 Photos: Yanick MacDonald

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