top of page
  • Photo du rédacteurYanik Comeau

Théâtre: «Les Plouffe» d’Isabelle Hubert d’après Roger Lemelin: Qu’est donc ma famille devenue?

par Yanik Comeau (Comunik Média/ZoneCulture)

Ça aura pris plus de deux ans, mais Montréal aura finalement eu droit à ses représentations de la première adaptation théâtrale du roman (avec des emprunts à l’œuvre cinématographique de Gilles Carle aussi) de Roger Lemelin, Les Plouffe. Ce projet du directeur artistique du Théâtre Denise-Pelletier en coproduction avec le Théâtre du Trident aura été perturbé par la pandémie ce qui fait qu’il aura vu le jour sur la scène du Grand Théâtre de Québec ce qui, au final, aura été quand même approprié puisqu’on avait confié l’adaptation et la mise en scène à des femmes de théâtre de la Vieille-Capitale, Isabelle Hubert et Maryse Lapierre, que plus de la moitié de la distribution était composée de comédiens originaires de Québec et que l'action s'y situe aussi, doit-on le rappeler.



L’adaptation d’Isabelle Hubert est très habile et permet tour à tour à des personnages secondaires de jouer les narrateurs. C’est le cas du journaliste Denis Boucher incarné par Maxime Beauregard-Martin (sympathique, vigoureux et attachant) et de ceux que l’on pourrait presque considérer comme un mini-chœur féminin (Edith Arvisais et Mary-Lee Picknell) et le mini-chœur masculin avec à sa tête Robin-Joël Cool et sa guitare. En plus de chanter sans transformer la pièce en théâtre musical, ces interprètes ajoutent à l’histoire et aident à la faire avancer sans qu’on ait l’air de couper les coins ronds.



Bien sûr, une partie de cette trouvaille revient à la metteure en scène Maryse Lapierre qui dirige habilement ce grand plateau et ce décor multifonctions de Marie-Renée Bourget Harvey qui, autour de la cuisine des Plouffe, permet une multitude de lieux sans trop de déplacements de meubles ou autres objets donc sans perte de temps entre les scènes.



Bien que le délai des représentations montréalaises ait fini par coûter la perte du père Plouffe original Gilles Renaud qui aura choisi de ne pas reprendre le rôle, c’est un Roger Léger tout aussi formidable qui prend la relève et joue, avec une Marie-Ginette Guay au sommet de sa forme, le couple aîné avec un heureux équilibre entre amour, humour et conflit subtil dans la gestion familiale. Chez les plus jeunes, ce sont tout particulièrement Frédérique Bradet (oh quel talent elle déploie lorsqu’elle joue sa Cécile Plouffe toute en nuances, drôle et déchirante à la fois), Jean-Michel Girouard (que j’avais découvert dans l’inoubliable L’Art de la chute et qui joue ici un Napoléon si attachant et touchant), Alice Moreault (en Rita Toulouse, si étonnamment efficace dans un contre-emploi, il faut le dire) et Alex Godbout (si adorable, charmant/charmeur, jeune et naïf en Guillaume) qui se méritent des éloges.



Malheureusement, parlant de contre-emploi, le choix de Renaud Lacelle-Bourdon en Ovide est un désastre. Ce comédien de grand talent, que j’ai pu apprécier dans plusieurs pièces au fil des années (une quinzaine en carrière jusqu’à maintenant!) déçoit ici en tombant dans le piège de faire du Renaud Lacelle-Bourdon justement. Jouer Ovide Plouffe de la même façon qu’il a joué des rôles plus fantaisistes comme dans La Logique du pire, L’Idiot, Le Rêveur dans son bain est une grave erreur. Ovide est un personnage maladroit, timide, raide et Lacelle-Bourdon le joue comme l’habile danseur et acteur physique qu’il est. On l’aurait accueilli à bras ouverts s’il avait su renouveler le personnage avec l’intelligence qu’on lui connaît mais il semble plutôt s'être dit: «Je suis un grand acteur, c’est un grand rôle, c’est tout naturel qu’on me l’offre». Des souvenirs du grand Albert Millaire me sont revenus à la mémoire lui qui, pendant un moment, s’était attaqué à quelques grands personnages du répertoire classique en s’assoyant sur ses lauriers. Souhaitons qu'il ne fera plus la même erreur.



Qu’à cela ne tienne, on ne peut que se réjouir d’avoir enfin Les Plouffe sur la scène du Théâtre Denise-Pelletier, la vision de Claude Poissant d’offrir au public scolaire des adaptations de grandes œuvres romanesques, cinématographiques et théâtrales de tous les répertoires opérant encore une fois. Les Plouffe devraient s’inscrire dans les classiques québécois importants, au théâtre maintenant tout autant qu'au cinéma et dans la bibliothèque.



Les Plouffe d’après le roman de Roger Lemelin et l’œuvre cinématographique de Roger Lemelin et Gilles Carle Adaptation théâtrale: Isabelle Hubert Mise en scène: Maryse Lapierre Assistance à la mise en scène et régie: Andréanne Garneau Assistance à la mise en scène à la création: Gabrielle Arsenault Avec Édith Arvisais, Maxime Beauregard-Martin, Frédérique Bradet, Robin-Joël Cool, Vincent Fafard, Jacques Girard, Jean-Michel Girouard, Marie-Ginette Guay, Alex Godbout, Renaud Lacelle-Bourdon, Gaël Lane Lépine, Roger Léger, Alice Moreault et Mary Lee Picknell Scénographie: Marie-Renée Bourget Harvey Costumes: Sébastien Dionne Assistante aux costumes: Dominique Giguère Lumières: André Rioux Musique et environnement sonore: Viviane Audet, Robin-Joël Cool, Alexis Martin Direction technique: Julie Touchette Accessoires: Émilie Potvin Maquillages: Marjorie Hardy Coiffures: Florian Van Wambeke Construction du décor: Alain Gagné Une coproduction du Théâtre Denise-Pelletier et du Théâtre du Trident Du 27 septembre au 21 octobre 2023 (2h10 sans entracte) Théâtre Denise-Pelletier, 4353, rue Sainte-Catherine, Montréal Réservations: 514-253-8974 Information: www.denise-pelletier.qc.ca Photos: Victor Diaz Lamich

30 vues0 commentaire
bottom of page