top of page
  • Photo du rédacteur

«Introduction à la violence» de Marie Brassard: Espace nébuleux fabuleux

by Yanik Comeau (ZoneCulture / Comunik Média)


Grande exploratrice de l’art théâtral et de l’intégration du multimédia dans les œuvres théâtrales, Marie Brassard est de la même école que Robert Lepage avec qui elle a beaucoup travaillé au fil des années, tant à la scène qu’au cinéma. En 2001, son premier spectacle solo Jimmy, créature de rêve, créé dans le cadre du Festival TransAmérique, remportait un immense succès et la poussait à poursuivre une carrière solo. Six spectacles plus tard et tant d’autres créations et participations comme comédienne, danseuse, metteure en scène, la créatrice arrive sur la scène d’Usine C avec Introduction à la violence, premier segment de ce qu’elle appelle – à raison – un spectacle hybride, un événement artistique qui mélange théâtre, musique, projections, images vidéo, mouvement et même chanson.


Bien que Marie Brassard se soit spécialisée dans le spectacle solo, on ne peut pas dire que «spectacle solo» soit synonyme de trip égoïste ou de mise en valeur narcissique dans son cas. Bien au contraire. La créatrice aime être entourée, travailler étroitement avec des artistes qu’elle admire dans les disciplines connexes qu’elle veut explorer et intégrer à ses créations.



Introduction à la violence, dans sa série de tableaux aux crescendos variables, fait un sérieux pied de nez à un des principes théâtraux de base, à la règle dramaturgique qui consiste à «montrer plutôt qu’à raconter» et ceux qui pourraient lui reprocher cette transgression gagneraient à y voir de plus près. Habilement écrits, ces monologues aux répliques hachurées, interrompues, découpées deviennent visuels dans la poésie corporelle que propose l’interprète. Bien qu’ils ne soient pas toujours limpides, ces troublants poèmes théâtraux compensent par leur grande beauté, leur précision dans le choix des mots. Petit bémol ? L’étrange choix de répéter constamment les mots «et tout à coup» comme si l’auteure manquait d’imagination ou de vocabulaire… ce qui n’est tellement pas le cas, on le sait bien.


La musique généralement très «techno» d’Alexander MacSween, avec qui Brassard a déjà collaboré quelques fois auparavant et développé une complicité palpable sur scène, est parfois (clairement volontairement) assourdissante, assommante, étouffante. Le choix est assumé, entier, efficace. Par moments très beau et mélodieux, par d’autres plus dissonant et confrontant, l’univers musical est omniprésent et joué en direct ce qui ajoute à l’impact du spectacle.


Les projections vidéo en direct et les images créées par Sabrina Ratté sont aussi saisissantes que l’interprétation de Marie Brassard elle-même. L’interprète est submergée dans des vagues de formes géométriques multicolores tordues, ondulantes qui rappellent parfois les univers de jeux comme Sim City et Mindcraft. Époustouflant.



J’ai un peu moins acheté le tableau dans lequel Marie Brassard semble décrocher de son propre spectacle pour nous faire un genre de making of de celui-ci. Elle se retrouve alors dans le même espace scénique que son musicien, une espèce d’appartement/studio en désordre. Malheureusement, cette partie de la scénographie est mal pensée parce qu’une partie de la salle ne voit pas la comédienne pendant la dizaine de minutes que dure ce tableau. Très agaçant.



Les spectacles de Marie Brassard ne sont pas pour tout le monde, comme en ont témoigné les deux fins-finauds assis devant moi qui se sont mis à «échanger» et à rigoler pendant le spectacle et qui sont sortis vers la moitié… pour le plus grand bonheur de ceux autour d’eux qui avaient envie d’adhérer à la proposition de l’artiste.


Peut-être y a-t-il quelques petits ajustements à faire au spectacle, mais somme toute, on passe un beau moment dans l’univers de Marie Brassard.



Introduction à la violence Texte, mise en scène et interprétation: Marie Brassard Conception sonore et musique live: Alexander MacSween Scénographie: Antonin Sorel Lumières : Mikko Hynninen Images vidéo et projections en direct: Sabrina Ratté Costumes : Marie Brassard et Julie Charland Sonorisation : Andréa Marsolais-Roy Une production de Infrarouge développée lors de résidences à Marseille (Montevideo), Montréal (Usine C) et Tanumshede, Suède (Vitlycke Centre for performing art) Du 1er au 4 mai 2019 (1h15 sans entracte) Usine C, 1345, avenue Lalonde, Montréal Réservations : 514-521-4493

Photos: Marlene Gélineau Payette

27 vues0 commentaire
bottom of page