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Théâtre: «La Vengeance et l’Oubli» d’Olivier Kemeid: Stratford-on-des-Pins

par Yanik Comeau (Comunik Média/ZoneCulture)


   Avec Five Kings – L’histoire de notre chute, Olivier Kemeid et ses Trois Tristes Tigres ont exploré les rois de Shakespeare (les deux Richard et les trois Henri) et Olivier Kemeid s’est imposé comme un superbe vulgarisateur du barde alors il ne faut pas s’étonner qu’il retourne à l’œuvre du maître de la tragédie anglaise pour boucler la boucle de sa direction artistique du Quat’Sous.



   La Vengeance et l’Oubli est le résultat d’une brillante recherche sur le personnage de Hamlet, une pièce qui s’inspire d’une des œuvres les plus fascinantes et complexes de Shakespeare. En la transposant dans l’ici et le maintenant, Olivier Kemeid poursuit son œuvre de vulgarisation (qu’il le souhaite ou non), rapproche Shakespeare de ses contemporains, permet à de nouvelles générations de s’approcher de la grande littérature.



   «L’histoire pourrait ressembler à celle d’Hamlet. Ça ne l’est pas exactement. Mais un peu quand même… » peut-on lire sur le site du Quat’Sous. Comment ne pas prendre cette phrase comme une boutade? Il s’agit bien de l’histoire d’Hamlet… cependant, en faisant de Hamlet Sr. un homme malade, alité depuis des mois, dans la réécriture de Kemeid, son meurtre peut prendre des allures d’achèvement de souffrances, de débranchement des machines aux soins palliatifs, de meurtre par compassion. La relation amoureuse entre la Reine Gertrude et son beau-frère Claudius, le frère du Roi, peut prendre des allures de «nous nous sommes tournés l’un vers l’autre pour nous réconforter et avons été surpris de tomber amoureux, mais voilà où nous en sommes maintenant». Dans le Hamlet de Shakespeare, malgré toutes les nuances que peuvent apporter les problèmes de santé mentale du personnage titre à l’histoire, il reste qu’il n’y a pas beaucoup de zones grises étant donné la violence du meurtre qui déclenche tout. Dans La Vengeance et l’Oubli, on est ailleurs et tous les personnages sont soudainement moins vilains, moins noirs ou blancs, et tout le monde devient plus humain.



   C’est, à mon avis, une des grandes forces de la pièce de Kemeid, sans parler de sa poésie. Kemeid sort Shakespeare des méandres du mélodrame, lui donne du relief.



Sur la toute petite scène du Quat’Sous, Kemeid metteur en scène exploite bien la scénographie multifonction de Romain Fabre, soutenue par les éclairages riches de Martin Labrecque et la musique magnifique de Philippe Brault.



   Mais autant on dira If it’s not on the page, it’s not on the stage, ceux et celles qui l’occupent, la scène, sont tous formidables. Gabriel Lemire, un acteur d’une grande profondeur, d’une polyvalence remarquable, incarne un Hamlet tout en nuance, puissant et crédible. C’est après l’avoir vu dans L’Éveil du printemps, Le Projet Riopelle, Chansons pour filles et garçons perdus, Doute raisonnable, Manuel de la vie sauvage à la télé et Géolocaliser l’amour qu’on peut mesurer l’ampleur de son talent dans ce rôle colossal. Mireille Naggar est une reine noble, parfois glaciale, parfois vulnérable, un choix rafraichissant. On veut la voir davantage. Richard Thériault, dans le rôle de l’Oncle Claudius, est aussi un excellent choix, grand acteur qui m’avait foudroyé dans Pour qu’il y ait un début à votre langue. Grand complice de Kemeid, Sasha Samar est excellent en Horatio et la jeune Anna Romagny est tellement charismatique en Ophélie, débordante de chimie avec Gabriel Lemire.



   Bref, je ne serai pas le premier à le dire mais Olivier Kemeid aura si bien réussi sa sortie du Théâtre de Quat’Sous. Un spectacle tout en son honneur.



La Vengeance et l’Oubli d’Olivier Kemeid d’après Hamlet de William Shakespeare

Mise en scène: Olivier Kemeid

Dramaturgie: Chloé Gagné Dion

Assistance à la mise en scène: Stéphanie Capistran-Lalonde

Avec Gabriel Lemire, Mireille Naggar, Anna Romagny, Sasha Samar et Richard Thériault

Conception de décor: Romain Fabre

Assistance au décor: Sophie Paquette

Conception des costumes: Cynthia St-Gelais

Assistance aux costumes: Sarah Chabrier

Conception des éclairages: Martin Labrecque

Musique: Philippe Brault

Régie: Stéphanie Capistran-Lalonde et Sandy Caron

Conception des maquillages: Florence Cornet

Conception des accessoires: Sophie Paquette

Réalisation des coiffures: Josianne Lacoste

Mouvement: Marilyn Daoust

Direction technique de création: Anne-Sara Gendron

Direction de production: Gwenaëlle L’Heureux-Devinat

Une création du Théâtre de Quat’Sous et de Trois Tristes Tigres

Du 16 avril au 11 mai 2024 (1h24 sans entracte)

Mardi et vendredi à 19h, mercredi et jeudi à 20h, samedi à 16h

Théâtre de Quat’Sous, 100, avenue des Pins Est, Montréal

Réservations : 514-845-7277

Photos: Frédérique Ménard-Aubin

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