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Théâtre anglo: «At the Beginning of Time» de Steve Galluccio: La mémoire du coeur

par Yanik Comeau (Comunik Média / ZoneCulture)

Depuis Mambo Italiano en passant par Les Chroniques de Saint-Léonard et Les Secrets de la Petite Italie, l’auteur Steve Galluccio raconte la famille et l’amour avec un biais italo-montréalais bien à lui. Son écriture est à la fois directe et crue, touchante et drôle, mordante et savoureuse. At the Beginning of Time, sa pièce la plus autobiographique (depuis Mambo Italiano, se plaît-il à dire mais encore plus avancerais-je), qui a pris l’affiche la semaine dernière au Centaur, sa deuxième maison (avec Duceppe), ne fait pas exception. Mais l’auteur a vieilli, sa carapace est devenue plus friable et – peut-être à cause de la pandémie – Steve Galluccio est devenu nostalgique et revisite le passé tout en se questionnant sur l’avenir.



Avec At the Beginning of Time, l’auteur se met en scène, son alter ego, Michael (magnifiquement interprété par Richard Jutras qui a même une ressemblance avec Galluccio !), étant un scénariste comme lui. Après avoir dû placer son mari dans un CHSLD parce qu’il souffrait d’Alzheimer’s précoce, Michael prend quelques jours de congé dans le sud et revient avec un virus qui lui cause de l’insuffisance rénale. Ses amis de longue date, des copains du secondaire, Lou (excellent Michael Miranda) et Pat (Stephen Lawson dont le niveau de jeu m’a semblé détonner mais qui est néanmoins attachant), viennent lui rendre visite à l’hôpital, excellent prétexte pour se rappeler des souvenirs d’adolescence, la musique des années 60, 70, 80, replonger dans la crise du SIDA, échanger des points de vue sur le système de santé (l’infirmière Nella, la petite sœur d’une autre amie du secondaire, y va elle aussi de quelques uppercuts contre les conditions de travail pas toujours évidentes; la comédienne Nadia Verrucci est formidable, à l’aise comme un poisson dans l’eau), sur le deuil, sur les valeurs (est-ce acceptable d’avoir un nouvel amoureux quand notre mari ne nous reconnaît plus?), etc.


Steve Galluccio dépeint trois hommes gais à l’aube de la soixantaine aux vécus semblables mais différents à la fois. Ils ont tous des racines italiennes, mais leurs enfances ont été bien différentes. Adultes, deux ont assumé pleinement leur homosexualité et eu des relations de couples stables mais le troisième, bisexuel, préfère les relations sans attache et la discrétion sur sa vie privée.


L’écriture de Steve Galluccio, qu’avant At the Beginning of Time j’avais surtout connue en français chez Duceppe (il a lui-même traduit Les Secrets de la Petite-Italie et Les Chroniques de Saint-Léonard avec la collaboration de Monique Duceppe) mais aussi grâce aux films Mambo Italiano, Little Italy et Funkytown, oscille toujours brillamment entre le rigolo et le poignant. Ses dialogues sont mordants et naturels. Avec At the Beginning of Time, il ne se gêne pour aller plus que jamais dans le très crunchy lorsque ses personnages parlent d’homosexualité, de sexe entre hommes. On n’est pas ici devant une pièce où l’action est prépondérante mais bien où les personnages, bien étoffés et attachants, nous invitent dans leur intimité.



La scénographie de Michael Gianfrancesco est magnifiée par la sublime et impressionnante reproduction d’Olympe ou Le Triomphe de Vénus, la fresque de Giambattista Tiepolo, recréée par le peintre scénique Daniel Barkley. L’équipement médical est authentique ce qui ajoute à la vraisemblance, au réalisme.


Bref, on aura attendu quelques années avant de pouvoir savourer à nouveau les mots de Steve Galluccio au théâtre mais l’attente en aura valu la peine. Espérons que le Michel Tremblay des anglophones pourra continuer à être joué sur nos scènes et qu’il sera encouragé à poursuivre l’écriture pour le théâtre, lui qui n’arrête pas de dire qu’il est vieux maintenant, dans un monde où l’âgisme est une triste réalité.


At the Beginning of Time de Steve Galluccio Mise en scène: Peter Hinton-Davis Assistant à la mise en scène: Adam Capriolo Assistante à la mise en scène et régie de plateau: Mélanie St-Jacques Interprétation: Richard Jutras (Michael), Stephen Lawson (Pat), Michael Miranda (Lou) et Nadia Verrucci (Nella) Scénographie et costumes: Michael Gianfrancesco Conception des éclairages: Andrea Lundy Conception sonore: Troy Slocum Assistante à la conception sonore: Christine ML Lee Régie de plateau: Élyse Quesnel Une production de Centaur Theatre Company Du 21 février au 12 mars 2023 (durée: 1h35 sans entracte) Centaur Theatre, 453, rue Saint-François-Xavier, Vieux-Montréal Réservations: 514-288-3161 Information: https://centaurtheatre.com/fr/shows/at-the-beginning-of-time/ Photos: Hera Bel et Andrée Lanthier

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