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«Les Coleman-Millaire-Fortin-Campbell» de Claudio Tolcachir: Famille déconstruite

Dernière mise à jour : 6 juin 2019


Par Yanik Comeau (Comunik Média / ZoneCulture)


Avec sa pièce La omisión de la familia Coleman, l’auteur argentin Claudio Tolcachir touche à l’universel : la famille. Pas une famille traditionnelle, s’entend, mais… qu’est-ce que c’est, vraiment, la famille traditionnelle au 21e siècle ? Dans son excellente adaptation/traduction, la comédienne Catherine Beauchemin transpose et les nombreux enfants de Loulou – pas tous du même papa, vous l’aurez deviné – tentent tous et toutes de tirer leur épingle du jeu dans un milieu qui pourrait très bien être au Québec ou ailleurs, mais qui, certes, ne pardonne pas. Le résultat ? Une tranche de vie d’une grande puissance, pleine de tendresse et d’humour tout autant que d’amour et de douleur.




Bien que la pièce se passe pendant la crise causée par l’effondrement du système économique en Argentine, comme l’explique le metteur en scène Louis-Karl Tremblay dans le programme, elle pourrait tout aussi bien se dérouler chez nous, aux États-Unis ou n’importe où dans le monde. Après tout, quel pays n’a pas connu ses crises ? Ainsi, les personnages se rassemblent, s’empilent, se réunissent dans un même petit appartement pour arriver à joindre les deux bouts. Seule exception ? Véronique (Catherine Beauchemin), celle qui a une bonne carrière, un mari qui est un bon parti, des enfants qui ont des vies «normales». Pas parfaites, mais… assez normales pour que Véronique ne veuille pas trop les exposer à sa pauvre mère (la toujours phénoménale Louise Cardinal que j’ai adorée dans Chienne(s) et dans La Nuit du 4 au 5 à la salle Jean-Claude-Germain la saison dernière et dans Quelque chose comme une grande famille au Petit Théâtre du Nord à l’été, elle qui, encore ici, arrive toujours avec une proposition extraordinaire) ou à ses demi-frères et demi-sœur.

Véronique est très attachée à sa grand-mère, interprétée par la toujours sublime Muriel Dutil qui sort à peine de sa tournée de Manifeste de la Jeune-Fille. Quand Mamie, la colle qui tient la famille ensemble, se retrouve à l’hôpital, c’est toute la vie familiale qui s’en trouve bouleversée. Qui ira où ? Qu’arrivera-t-il de Mario (un Simon Landry-Désy épatant), le jeune frère déficient pas assez autonome pour vivre seul ? Que fera Gabi (attachante et touchante Kariane Héroux-Danis) qui, après tout, aurait peut-être – elle – une chance de s’en sortir ? Si on lui donne, si elle se la donne. Et David (Daniel D’Amours)? Est-ce que Loulou pourrait vivre sans lui s’il quittait le foyer familial ? Est-ce que c’est pour ça qu’il reste ? Par culpabilité ?

Les enjeux de chacun des personnages fascinent. On se laisse porter par l’histoire et on s’attache facilement aux personnages, à cette famille complètement déjantée et instable qui, pourtant, réussit à tenir… par un fil… et grâce au soutien financier de Véro, on le sent bien. Mais où commence et où s’arrête la responsabilité, les liens de sang? La pièce pose beaucoup de questions et ne proposera pas beaucoup de réponses, mais ce n’est pas son rôle. On sort comblés de cette rencontre avec les Coleman-Millaire-Fortin-Campbell. Parce que le texte est solide, que la mise en scène est efficace et au service d’une distribution qui embrasse les personnages avec efficacité et respect.

On sort de cette expérience grandis. On a envie de découvrir les autres pièces de Claudio Tolcachir comme quand on est allés à la rencontre de Kobo Abe avec Les Amis ou quand on a découvert l’écriture singulière d’un Martin Crimp ou d’un Martin McDonagh. Il faut voir Les Coleman-Millaire-Fortin-Campbell, même si ce n’est pas évident de retenir la série de noms de famille dans le bon ordre !


Les Coleman-Millaire-Fortin-Campbell de Claudio Tolcachir Traduction et adaptation : Catherine Beauchemin Mise en scène: Louis-Karl Tremblay Avec Catherine Beauchemin, Louise Cardinal, Luc Chandonnet, Daniel D’Amours, Muriel Dutil, Kariane Héroux-Danis, Simon Landry-Désy et Olivier Turcotte Une production du Théâtre à l’eau froide Du 22 janvier au 9 février 2019 (1h30 sans entracte) Salle Fred-Barry (Théâtre Denise-Pelletier), 4353, rue Sainte-Catherine, Montréal

Réservations : 514-253-8974

Photos : Marie-Andrée Lemire

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