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«Dans le champ amoureux» de Catherine Chabot: Faut que ça reste dans la chambre à coucher

par Yanik Comeau (Comunik Média/ZoneCulture)


Après avoir exploré les méandres de l’amitié avec sa pièce Table rase qui mettait en scène six filles aux prises avec une crise de la jeune trentaine aigüe, la comédienne et dramaturge Catherine Chabot investit à nouveau la scène d’Espace Libre avec Dans le champ amoureux, plongeant cette fois dans l’univers du couple et de la chambre à coucher des trentenaires. Ce nouveau texte, qui lui a mérité le prix de l’auteure la plus prometteuse, remis par le CEAD lors du festival Zone HoMa en 2015, ne déçoit pas. Au contraire. Il ravit.


Plus intimiste que Table rase, qui était déjà un huis-clos à six (plus un!), Dans le champ amoureux est une partie de ping-pong à relais dans laquelle Catherine Chabot-comédienne partage la scène avec Francis-William Rhéaume pendant les deux premiers tiers de la pièce (mon humble calcul, à l’œil, absolument pas calculé ou scientifique – je n’ai pas de montre et, si j’en avais une, jamais me serait venue l’envie de la regarder pendant la pièce parce que j’étais beaucoup trop «dedans») avant que celui-ci quitte et arrive Fayolle Jean Jr. pour la suite du match verbal. Rhéaume reviendra avant la fin, mais Jean aura alors quitté. De là mon image de ‘relais’.



Dans le champ amoureux, c’est l’histoire d’un couple de jeunes trentenaires éprouvé par son infidélité à lui, elle auteure, lui chargé de cours en philosophie. Cette infidélité refera surface et sera exacerbée par le rendez-vous qu’il a donné à cette fille avec qui il l’a trompée ! Humiliée, blessée – dans son amour-propre tout autant que dans son cœur, souffrant d’insécurité, elle menace de le tromper à son tour s’il passe le pas de la porte.



Avec cette deuxième pièce, Catherine Chabot consolide son talent de dialoguiste. Ses répliques sont savoureuses, brillantes, intelligentes. On en veut encore, encore, encore ! Bien dirigés par Frédéric Blanchette qui se met au service du texte et qui pousse les comédiens dans leurs derniers retranchements, Catherine Chabot et Francis-William Rhéaume prennent clairement leur pied – encore plus que leurs personnages, sans faire de jeu de mot déplacé ! – et partagent avec une vérité désopilante et un rythme réglé au quart de tour cette partition verbale délicieuse. Bien que le niveau de jeu de Fayolle Jean Jr. vienne quelque peu détonner (et que quelques-uns des ‘moments complices’, des insides entre les personnages semblent un peu plaqués – c’est une des choses les plus difficiles à écrire et à faire passer !), il tire néanmoins son épingle du jeu, interprétant un personnage un peu moins étoffé et bien défini que les deux premiers.



Qu’à cela ne tienne, Catherine Chabot livre une pièce solide, forte, bien construite et agréable à voir. En plus de trente ans de fréquentation du milieu théâtral québécois, je n’ai jamais – de mémoire – vu un théâtre présenter deux pièces d’un même auteur, une après l’autre dans une même saison (même si Table rase est une reprise). Dans une ère où, en plus, on se plaint de ne pas faire la place belle aux voix féminines sur nos scènes, ce n’est pas rien.



Comme si les directeurs artistiques (ou, en tout cas, certains d’entre eux) s’étaient donné le mot qu’il fallait monter plus de «textes féminins» en 2017-2018 – et pourquoi pas ? des jeunes femmes, de surcroît ! –, la première moitié de la saison nous propose des œuvres de Sarah Berthiaume, Catherine Chabot, Marianne Dansereau, Evelyne De La Chenellière, Rachel Graton, Isabelle Hubert, Angela Konrad, Dominique Leclerc, Catherine Léger… et c’est loin d’être terminé ! Maintenant, si l’on faisait plus de place aux metteures en scène… ? Mais c’est un autre dossier, me direz-vous…


En attendant, courez voir Dans le champ amoureux pour l’écriture brillante, pétillante, savoureuse de Catherine Chabot et pour ce magnifique trio d’acteurs… ou plutôt, ces deux duos, ces deux lignes qui ne formeront jamais plus qu’un angle obtus. Pour le meilleur et pour le pire. Mais surtout le meilleur dans le pire.






Dans le champ amoureux

Texte: Catherine Chabot

Mise en scène: Frédéric Blanchette

Avec Catherine Chabot, Francis-William Rhéaume et Fayolle Junior Jean

Une production Corrida, parrainée par le Nouveau Théâtre Expérimental

Du 7 au 25 novembre 2017 (1h15 sans entracte)

Espace Libre, 1945, rue Fullum, Montréal

Réservations : 514-521-4191

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